Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le costume historique
27 avril 2019

Culotte - XVIIe siècle

Les années 1600

 

 

Aux Pays-Bas

 

La première décennie du XVIIe siècle est marquée par le retour des formes amples et ballonnées. Elle constitue l'aboutissement d'une période de transition entre deux tendances opposées, l'une étroite et serrée et l'autre volumineuse et étoffée. 

C'est par les Pays-Bas que la présentation commence, car l'épanouissement artistique du siècle d'or néerlandais met à la disposition des historiens d'aujourd'hui un important stock d'images qui permet d'en saisir les différentes évolutions.

Pendant la première décennie du siècle, la mode de la « culotte » est ainsi dominée par trois tendances principales plus ou moins successives :

Pays-Bas 1600-1610

1- la « culotte » ouverte au genou de type « bermuda » ; c'est la tendance de la décennie précédente. Dans les années 1600, elle est en fin de parcours.

2- la « culotte » fermée et bouffante, qui succède à la tendance précédente par opposition des effets : l'une est fermée / l'autre était ouverte (à l'ouverture du genou) ; l'une est bouffante / l'autre donnait l'apparence d'être creuse .

3- la « culotte » ballonnée ; c'est une mode qui procède des tendances précédentes. La chausse prend du volume par ballonnement dans une ampleur qui connaît son apothéose à la toute fin de la décennie.

 ***

L'hiver, 1601- Tendance n° 1

La « culotte » ouverte au genou atteint son apogée dans les premières années du XVIIe siècle.

Elle se présente en coupe droite dans une forme semblable aux bermudas d'aujourd'hui (image ci-contre : L'hiver, 1601, d'après Goltzius). Il ne s'agit pas d'une « culotte courte », car en longueur, elle s'étend au genou qui est plus ou moins recouvert.

Breen, Verspilling in het huwelijkDans les années 1600, elle présente un volume très ample qui tranche avec la ligne serrée des années 1590. Sa forme large et flottante rappelle la mode des baggy shorts portés par les basketeurs américains dans les années 1990 (image ci-contre).

Dans le courant de la décennie, la « culotte » cède à la mode du ballonnement et perd sa coupe droite au profit d'une contenance renflée (galerie d'images ci-dessous). Sous la poussée des nouvelles formes bouffantes comme la chausse en bourse, elle finit par disparaître de l'iconographie à la fin de la décennie.

Variarum Gentium Ornatus, Belges, 1605-10La mode de la chausse ouverte est très présente dans les scènes de genre aux Pays-Bas. Cela laisse supposer que c'est dans les pays d'Europe du Nord que cette tendance s'est developpée.

Dans la série consacrée aux costumes des différentes nations, Variarum Gentium Ornatus gravée vers 1605-1610 par Peter Jode, trois personnages sur dix portent ce type de culotte ; l'un est anglais, et les deux autres représentent les Pays-Bas espagnols (image ci-contre : représentations d'un marchand et d'un noble de nationalité belge). Les Pays-Bas du Nord ne sont pas représentés dans cette série, mais cette mode apparaît dans de nombreuses estampes des maîtres néerlandais, à l'instar de Van Breen et Visscher (images ci-dessous).

La confrontation des images montrent l'évolution de la ligne sur une décennie, marquée sur sa fin par la tendance au ballonnement.

 Pays-Bas, 1600-1610

 

  

  ***

Cour vers 1610- Tendance n° 2

La « culotte » bouffante des années 1600 se présente allongée, couvrant les cuisses jusqu'aux genoux et d'une contenance rembourrée. Son aspect bouffant au genou prend le contrepied de la mode précédente.

Elle est illustrée par les dessins de soldats gravés par Jacques de Gheyn (Provinces-Unies), et les scènes de banquet de Louis de Caullery (Pays-Bas espagnols).

Dans la série Variarum Gentium Ornatus gravée vers 1605-1610 de Peter Jode, elle habille les élégants français, italiens et portuguais. 

  Caullery (attr), An elegant company

 

Soldats, Gheyn

 

 

***

 

Avercamp 1608-1610- Tendance n° 3

Dans le courant de la décennie, la « culotte » adopte une ligne ballonnée qui atteint son apogée au passage des années 1610 (image ci-contre, un patineur, par Hendrick Avercamp, 1610).

Jan Claesz_1602_Albert-SonckCette tendance naît en opposition au style des années 1580 et 1590 qui étaient marquées par une coupe relativement droite et l'ajustement des culottes à la taille des cuisses.

Il s'agit également d'une réaction à la mode des culottes ouvertes, à leur style flottant et creux. A la mode des baggy short, succède donc une mode plus arrondie, consistante et étoffée. La nouvelle tendance apparaît dès le début de la décennie. La ligne se présente alors légèrement courbe ou galbée (image ci-contre, portrait d'Albert Sonck et son fils, par Jan Claesz, 1602).

Circle of Jan Claesz, 1609L'amplitude de la fin de la décennie rappelle la rondeur des chausses à la gigotte portées dans les années 1565-1575. Il s'agit de la résurgence d'une mode vieille de quarante ans (réminescence cyclique des modes qui sautent une génération). La seule différence est qu'il n'y a pas d'ajustement au bas de la cuisse. Il ne s'agit pas d'un gigot qui moule le genou. Ce dernier reste dissimulé sous plusieurs plis bouffants ou sous l'effet de l'ouverture au genou.

Jusqu'à la fin de la décennie, la mode du baggy short demeure mais combiné avec le ballonnement, elle finit par s'étioler. Sous l'effet de renflement, l'ouverture au niveau du genou finit par disparaître (images ci-contre, par Jan Claesz, 1609).

A la fin de la décennie, la « culotte » se présente comme un gros ballon rond. Ce ballonnement est particulièrement remarquable sur les portraits et scènes de genre des années 1608 et 1609. 

ballonne-1608-1609_petitformat

 

 

 

En France

 

Dans les années 1600, la  « culotte » continue de se porter ouverte, mais se différencie de la décennie précédente par sa coupe galbée. La culotte devient ballonnée.

 

HIV

Ainsi, les tendances observées pour les Pays-Bas se retrouvent en France, bien que l'iconographie française n'offre pas un corpus aussi riche pour les présenter en détail.

HIV_version2Ce qui a de remarquable, c'est que la mode du « bermuda » s'observe sur des gravures représentant non seulement des gentilshommes, même aussi le roi lui-même (image ci-contre : extrait d'une gravure célébrant le mariage d'Henri IV avec Marie de Médicis , British museum ; et Henri IV touchant les écrouelles, BnF). La juxtaposition des deux images montrent deux coupes distinctes : sur celle de gauche, Henri IV porte une chausse à la coupe plutôt droite, (avec, peut-être, un très léger renflement au niveau des hanches) tandis que sur celle de droite, Henri IV porte une chausse à la forme plus galbée. 

Thomas de Leu, Le soldat et la mort, 1600Frontispice_Isle_des_Hermaphrodites_Munich_Bibliotheque_v2Cette coupe galbée se retrouve sur deux autres gravures contemporaines au règne d'Henri IV.

La première est la caricature qui se trouve en frontispice de L'isle des hermaphrodites, le fameux essai qui dénonce les hommes aux moeurs de femme. Sa coiffe est celle d'une dame, mais sa chausse - renflée et ouverte - est celle de la mode masculine (image ci-contre à gauche, tirage de la Münchner Stadtbibliothek, c. 1605).

La seconde est une oeuvre de Thomas de Leu datée de 1600, intitulée Le jeune homme et la mort (image ci-dessus à droite, tirage de la BnF) ; la gravure représente un jeune homme affrontant l'allégorie du temps qui passe.

De Passe vs Leu, circa 1600Ce qui est intéressant avec cette gravure, est qu'elle est la reprise d'une oeuvre du néerlandais Crispin de Passe (tirage du British museum)6. Thomas de Leu, son contemporain français, a modifié l'habit du jeune homme pour l'adapter à la manière française. En juxtaposant les deux oeuvres, ce sont deux modes différentes qui apparaissent : l'une néerlandaise avec une « culotte » à la coupe droite, et l'une française avec une « culotte » à la ligne courbe.

On peut dès lors s'interroger sur l'origine de cette mode du renflement et s'il ne faut pas y voir une tendance à l'origine française. S'il n'est pas possible de le confirmer, on peut à tout le moins établir qu'elle était déjà une mode en France avant que ne commence la décennie, la gravure étant datée de 1600.

Cette forme renflée est encore plus marquée sur les gravures de Jan van Haelbeck, artiste flamand travaillant à Paris (images ci-dessous : extraits des Enigmes joyeuses pour les bons esprits (ré)éditées vers 1615). Ici, les images montrent distinctement que le ballonnement se situe au niveau des hanches, comme si ces hommes portaient un bourrelet en dessous de la ceinture. Ce détail à son importance,  car c'est ce qui caractérise les années 1600 et ce qui permet de comprendre la suite de la tendance.

Jan van Haelbeck

 

Le deuxième point important est que comme aux Pays-Bas, la « culotte » ouverte aux genoux finit par disparaître. Elle n'apparaît plus dans l'iconographie des années 1610.

Pompes funèbres de Charles IIISur les gravures commémoratives de l'enterrement du duc Charles III de Lorraine en 1608, les hommes portent une culotte fermée. Parmi la centaine de personnages représentés, aucun ne porte le « bermuda ». Celui-ci semble être passé de mode  (images ci-contre : extrait des Pourtraictz des ceremonies, honneurs et pompe funèbres, du duc Charles III, commandé en 1610 et publié en 1611).

1611v2En revanche, la chausse renflée se maintient encore ; elle semble même plus ballonnée que jamais.

En France aussi, les images montrent que vers 1610, cette mode du ballonnement a atteint son apogée.

Pour un aperçu "statistique" des typologies du haut-de-chausses et de sa répartition sociale autour de 1610, je recommande la série de gravures de Merian, intitulée L'ordre tenu au marcher parmy la ville de Nancy capitale de Lorraine à l'entrée en icelle du serenissime prince Henry II (liens vers le site Gallica : nobles, bourgeois, gens de justice).

 

 

 

 

 

Les années 1610

 

 

En France

La tendance des années 1610 s'inscrit dans la continuité de la décennie précédente avec des « culottes » bouffantes très amples, mais avec une différence importante au niveau de la forme : la culotte ballonnée qui caractérisait les années 1600 cède la place à une culotte affaissée en plis sur les genoux. (images ci-dessous : extraits des Enigmes joyeuses pour les bons esprits en deux éditions différentes, par Halbeek et Merian, BnF)

comparaison-1600-1610_v3

 

comparaison4Les images sont tirées d'une série de gravures éditée une première fois à une date inconnue mais qui selon la mode des vêtements serait à situer dans les années 1600. Puis, vers 1615, cette série a été modifiée et rééditée à deux reprises. Comme pour la gravure  du Jeune homme et la mort, l'habit du galant a été mis à jour faisant apparaître la tendance majeure des années 1610 : l'effet bouffant de la culotte s'est déplacé de haut en bas, dans un basculement radical, des hanches aux genoux.

Par ailleurs, la culotte est non seulement fermée, mais son orifice est désormais dissimulée par des plis très amples. De ce cette amplitude, la culotte tire son nom de chausse à gros plis, ou chausse à tuyaux d'orgue. En raison de  sa forme boursouflée, on lui donne également le nom de chausse en bourse.

Ce modèle s'observe autant dans la noblesse que dans la classe bourgeoise (images ci-dessous : extraits de gravures représentant de gauche à droite un marchand parisien ; un jeune galant ; et un homme trentenaire)

 Merian hommes de la bourgeoisiev2

 

L'autre grande nouveauté du XVIIe siècle, est que la « culotte » est devenu un article d'élégance aristocratique. Sa présence dans les portraits d'apparat montre son enracinement dans la mode nobiliaire (images ci-dessous : portraits d'Henri IV par Frans Pourbus, 1610 ; Charles de Guise, s.d. ; et son frère le prince de Joinville par le même Pourbus, 1610. La « culotte longue » a désormais sa place sur les portraits officiels de la haute noblesse française. La disparition du culot qui l'accompagnait auparavant, est significatif de la transition qui s'opère au début du XVIIe siècle. L'image sociale de la culotte et de la trousse est en train de s'inverser.

Rois et princes français, 1610 et environ

La chausse du prince de Joinville (troisième image à droite) offre ici le modèle d'une chausse à plis très amples au-dessus du genou ; le portrait est daté de 1610 et déjà le renflement a basculé vers le bas. Il montre que le retournement de la tendance avait déjà commencé avant cette date.

Au milieu de la décennie, vers 1615, la chausse n'est définitivement plus bombée ; ses plis retombent désormais verticalement sur les genoux. Cette tendance procure au gentilhomme une ligne allongée qui rappelle la mode espagnole des trousses à la ligne verticale (image ci-dessus : portrait du roi Louis XIII à gauche).

Chausses en bourse, France années 1610

 

En Angleterre

La série de portraits présentés ci-dessous présente les trois grandes tendances successives de la décennie.

En 1610, la « culotte » se présente ballonnée en forme de bourse (première ligne de portraits ci-dessous). Puis, dans le courant de la décennie, elle s'affaisse et perd de sa rotondité. Sa forme passe d'une ligne concave à une contenance flasque (deuxième ligne de portraits ci-dessous). Sa ligne devient presque convexe. L'aspect bouffant au-dessus des genoux maintient la forme en bourse.

Portraits anglais circa 1610

Chausses anglaises, années 1610

A la fin de la décennie, les portraits du roi Jacques d'Angleterre montre un changement de forme radical. La tendance revient à une forme en oeuf, mais inversée au regard de la mode dominante. Au lieu d'être bouffante au-dessus des genoux, la culotte est arrondie dans sa partie supérieure (ligne de portraits ci-dessous). La libération du genou est la grande tendance des années 1620.

James Ier circa 1618

 

 Aux Provinces-Unies

 

Vinckboons, De buitenpartij, circ 1610Au commencement de  la décennie, l'hypertrophie du haut-de-chausses est à son apogée. Les peintures de genre du siècle d'or hollandais en offrent de nombreuses illustrations.

Pour le début des années 1610, l'amplitude de plis marque les oeuvres de David Vinckboons. Le peintre néerlandais s'est spécialisé dans les scènes de village, mais aussi dans les parties de campagne comme l'illustre l'image ci-contre (extrait d'une garden party). L'image offre le visuel d'une « culotte » particulièrement bouffante. Peinte vers 1610, elle illustre une tendance qui est à son point culminant.

Puis, la chausse perd son ballonnement et adopte une ligne verticale. Cette tendance est très bien illustrée par les oeuvres d'un autre peintre néerlandais : Willem Buytewech. Son art met en scène des banquets où se retrouve la silhouette très verticale de la chausse à plis.

Buytewech a aussi laissé des gravures de mode ; le Rijksmuseum en conserve quelques unes, datées de 1615, représentant des jeunes hommes sensés être originaires de pays différents (illustrations ci-dessous) ; la coupe de la « culotte » reste la même : verticale et allongée.

Buytewech, 1615

Buytewech, Voorname vrijage, 1616-1620, RijksmuseumL'aspect dominant de cette période est que la culotte à gros plis est tellement bouffante dans sa partie inférieure  que visuellement, elle fait disparaître le genou. C'est son effet le plus caractéristique ; à la décennie suivante, le genou sera au contraire à découvert.

Buytewech est décédé très jeune à l'âge de 32 ans en 1624. Dans les années 1620, sa peinture a influencé un autre peintre spécialisé dans les scènes de genre : Dirck Hals, frère du celèbre portraitiste Frans Hals. L'oeuvre de Buytewech et de Dirck Hals constituent une précieuse source documentaire pour l'étude de la mode.

 
 

 

Les années 1620

 

En France

 

Dans les années vingt, la chausse n'a plus la forme triangulaire et verticale de la tendance précédente mais plutôt la ligne ovale d'un oeuf (images ci-dessous : portrait du jeune roi Louis XIII vers 1610 et 1620).

LouisXIII_1610-1620def

 

Louis XIII victorieux, 1620Sa contenance est toujours bouffante, mais elle ne retombe plus de façon flottante sur les genoux ; elle s'arrête au bas de la cuisse et est resserrée dans sa partie inférieure, laissant voir l'ouverture au-dessus du genou. C'est la grande nouveauté des années 1620, l'orifice par où passent les jambes est visible ; sur le portrait du roi Louis XIII ci-contre, il est fermé par des aiguillettes, sortes de cordons munis d'un embout métallique appelé ferret 7. Ce qui était conventionnel de cacher, devient un ornement de mode.

Le genou est désormais à découvert.

Dans les pages illustrées de L'instruction royale de Pluvinel, gravée par Crispin de Passe, plusieurs types de hauts-de-chausses sont représentés. Les chausses de la tendance du moment, à l'instant décrites, habillent les jeunes hommes représentés sur les images ci-dessous. En revanche, les personnes plus agées portent une chausse allongée plus datée (cachant le genou) et plus sobre (dans la ligne) (exemple avec le marquis de Souvré, précepteur de Louis XIII, représenté à droite sur ce lien vers Gallica). 

Pluvinel, L'instruction du roi, 1620-1625

 

***

Gentilhomme françaisEn France, cette tendance d'une culotte courte de forme ovale n'a pas traversé la décennie. A la fin des années 1620, une autre tendance se manifeste, celle de la chausse allongée sans ballonnement, ni gros plis (images ci-contre).

David Charles, L'Espoir de la FranceAu fur et à mesure de la décennie, le haut-de-chausses perd en effet de sa rotondité. Du point de vue de la ligne, il s'adapte à la forme des cuisses, sans être moulant. La chausse perd ses gros plis, mais reste encore légèrement bouffante. Elle s'allonge à la hauteur des genoux et prend la forme d'une chausse à l'aspect flottant.

La transition n'est pas évident à montrer sur le plan iconographique. Il s'agit d'une réminiscence de la chausse portée dans les années 1600, avec une ligne moins bouffante.

Ce n'est plus une chausse ballonnée (1605-1615), ni une chausse en bourse (années 1610-1620), ni une chausse en tuyaux d'orgue (années 1615-1620).

 

En Suède

Pourpoint et culotte bouffante du roi de Suède vers 1620Les collections royales de Suède comprennent des pièces de vêtement et des tableaux qui illustrent assez bien la forme ronde ou ovale de la « culotte » bouffante des années vingt. Sur les portraits des hommes de guerre présents dans ces collections (images ci-dessous), ce ballonnement des formes est très marqué. Les genoux sont à découvert, à contrepied de la mode des années 1610.

La mode suédoise ne suit pourtant pas de logiques différentes des tendances européennes. Comme en France, on observe que dans le courant de la décennie, la « culotte » bouffante s'affaisse et s'avachit.

 

Portrais de militaires suédois 1623-1624

 

En Angleterre

Les portraits anglais montrent la même forme ovale et légèrement ballonnée.

Par ailleurs, comme sur le portrait de Louis XIII, vu précédemment, l'ouverture du bas de la chausse est visible, laissant à découvert la rangée d'aiguillettes qui la ferme. La forme raccourcie de la chausse produit ainsi le développement d'une nouvelle tendance : l'ornementation du bas de la « culotte » par l'agencement esthétique des cordons de fermeture. Cette utilisation harmonieuse des cordons est promise à un avenir durable.

Chausses anglaises, années 1620

 

 

 

Les années 1630

 

En France

Dans les années trente, la tendance est à une forme allongée au-dessous du genou et à une coupe de plus en plus ajustée. A la fin de la décennie, la « culotte » se présente comme un pantacourt à la coupe presque droite. Sa forme ne doit pas être confondue avec le patalon 8.

La galerie d'images ci-dessous sont des portraits de princes français (ou lorrains), peints par Ferdinand Elle et Antoine van Dyck entre 1630 et 1635. La période présente encore des chausses au tissu flottant, mais de forme allongée. Le premier portrait peint en 1631 présente encore une chausse fermée aux genoux. En revanche, les portraits suivants présentent plutôt une chausse ouverte autour du mollet.

Portraits francais, 1630-1635

 

 

En Angleterre

La chausse à gros plis passe d'une ligne ample (première ligne de portraits ci-dessous) à une forme allongée. Comme nos pantalons modernes, elle adopte une coupe droite (deuxième ligne de portraits ci-dessous).

Portraits anglais, 1631-1635

 Portraits anglais, 1635-1636

 

 

Aux Provinces-Unies

Portraits hollandais, 1635-1640

 

 

 

Les années 1640

 

 

En France

 

Dans les années quarante, la culotte est ouverte au niveau des genoux dans une amplitude qui rappelle les années 1590-1600. C'est le retour du "baggy short" (sorte de bermuda hyper large). Autant la culotte était ajustée dans les années 1630, autant elle devient flottante dans les années 1640.

1646-1648

 

Louis XIV enfant c1650 Nocret (attrib)Cette tendance caractérise les premières années du règne de Louis XIV. Elle habille ses portraits dès sa sortie de la petite enfance (image ci-dessous à gauche : extrait du portrait d'Anne d'Autriche avec ses fils Louis XIV et Philippe d'Anjou par Beaubrun, 1646, musée national de Suède)

Cette mode va se poursuivre dans les années cinquante et donner naissance à une jupe-culotte qu'on appelle rhingrave.

Louis XIV, 1643-1649

 

 

  Aux Provinces-Unies

 

La forme de la culotte reste encore très allongée mais présente une amplitude qui n'existait pas auparavant.

PB_1640-1645

 

Ici encore, la surabondance de l'iconographie néerlandaise nous permet de faire une comparaison diachronique qui met en valeur l'évolution de la tendance : entre le début de la décennie et sa fin, le changement est très perceptible.

1969_HelstVers 1640-1643

(Schutters van wijk VIII in Amsterdam onder leiding van kapitein Roelof Bicker par Bartholomeus Van der Helst, c. 1640-1643, Rijksmuseum).

Le tableau montre la diversité des coupes, des matières et du coloris.

On y trouvera ainsi une façon "habillée" de porter la culotte (répresentée ici à gauche en rouge dans une coupe ajustée assez classique), et une autre plus militaire, portée sur une botte à entonnoir et toujours décorée d'aiguillettes.

1639 Bartholomeus van der Helst, détailBien que la culotte reste encore plus ou moins ajustée, on peut  constater ici que dès le début de la décennie, la culotte peut se porter très ample.

La forme du baggy short est déjà présente (illustration ci-contre à gauche), mais elle est encore rare.

 

 

 

P_Flinck_1648_50_Schutters_van_Wijk_1_onder_kapitein_Joan_Huydecoper_RKDVers 1648-1650.

(Schutters van Wijk onder kapitein Joan Huydecoper par Govert Flinck, c. 1648-1650, Rijksmuseum)

Peint plus de cinq ans plus tard, ce tableau montre que la forme du baggy short habille désormais la plupart des officiers. Sa taille est beaucoup plus ample qu'au début de la décennie.

1648, Helst, The celebration of the peace of Münster(Banquet de la garde civile d'Amsterdam fêtant la paix de Münsterk par Bartholomeus Van der Helst, 1648, Rijksmuseum)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les années 1650

 

 

Dès le début de la décennie, les canons sont si larges que le haut-de-chausses a des allures de jupe culotte à la coupe droite. La culotte en rhingrave est née.

1650-1654

 

 

 Epilogue

 

 

La culotte en rhingrave atteint son apogée dans les années 1660. Cette mode se diffuse également aux Pays-Bas espagnols (image ci-dessous, La réception du prince de Ligne par le roi d'Angleterre ; 1660)

Duchatel_1660_Charles_II_receives_the_Spanish_Ambassador

 

Michael Korybut WiśniowieckiDans les années 1660, elle est si ample qu'elle apparaît sous la forme d'une jupe sans entrejambe (image ci-contre : Portrait de Michael Korybut Wisniowiecki, circa 1670).

Son règne ne dure qu'un temps. Dans les années 1670, l'artiste néerlandais Romeyn de Hooghe édite une série de gravure de mode qui illustre sa disparition (images ci-dessous). La rhingrave apparaît sur différents personnages masculins ; sa longueur la fait descendre jusqu'à mi-mollet. En revanche, le riche seigneur qui suit la mode de la cour, est déjà passé à un autre style (quatrième figure à droite) : il porte la rhingrave sous un justaucorps long et large qui la dissimule ; la rhingrave elle-même est plus courte. L'estampe ne permet pas de le voir, mais la rhingrave est désormais posée sur une culotte bouffante, prémices d'un nouveau départ pour la mode de la « culotte ».

 

Figures à la Mode

 

Leclerc_Sébastien_Louis_XIV_s'entretient_avec_Colbert_GallicaDevenue désuète, la culotte en rhingrave est reléguée à un usage commun. Dans les années 1680, elle est portée par les catégories socio-professionnelles moins soumises aux caprices vestimentaires.

A la cour de France, la rhingrave continue ainsi d'habiller le principal ministre Jean-Baptiste Colbert. Les images qui le représentent avec le roi Louis XIV, l'habillent toujours en « jupe ». Son habit austère et désuet est un marqueur d'identité sociale qui le renvoie à ses origines marchandes et à son statut de grand commis. Dans cette gravure de Sébastien Leclerc (image ci-contre), apparaîssent ainsi deux façons de s'habiller, l'une d'épée (à gauche), l'autre de bureau (à droite).

 

 


 

Notes et références

5. L'expression se trouve dans Le Dictionnaire universel d'Antoine Furetière à l'entrée chausse : « ce sont des chausses qui sont si amples, que les plis qu'elles font naturellement, imitent les tuyaux d'orgues ».

6. Le thème est très ancien ; voir l'article consacré à ce sujet sur un blog dédié à l'estampe.

7. LELOIR Maurice, Dictionnaire du costume et de ses accessoires, des armes et des étoffes des origines à nos jours, Paris, Gründ, 2012, p. 3 et 154.

8. Au XVIIe siècle, le pantalon désigne un vêtement long (jusqu'aux chevilles) et collant. Il est à tort employé pour désigner la mode sous Louis XIII (comme dans BOUCHER François, Hist.... et dans RUPPERT Jacques,  Le cost... ).

Publicité
Publicité
Le costume historique
Publicité
Publicité